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Nico

DUMA, créolisation musicale chez Nyege Nyege Plus: Phelimuncasi



Pour le retour de DWTN aux affaires je me devait que ça cogne fort. Et ce dans tous les sens du terme. Comprenez-moi amis dominés. De longues semaines sans pouvoir écrire la moindre chronique et tout ça parce que nous vivons sous l' ère néo-libéral de l' idiocratie dominante. Pour explication je me dois de vous préciser que l' auteur de ces mots est soignant et que ces dernières semaines ,si cela ne vous a pas échappé, il y avait comme qui dirait, quelques petits désagréments dans ma vie de soignant. Et ensuite pas mal de désespoir au point de perdre l'envie d' écrire. Mais! Pas celle, vitale, d' écouter du son! Et si à cela on rajoute la gigantesque frustration face au manque total de curiosité d'une bonne partie de la critique musicale mondiale qui avait pourtant mille fois le temps de tenter de partir à la recherche de la bande-son du jour d' après. Malheureusement le jour d' après ressemble au jour d' avant dans ce domaine aussi. La rétromanie continue malgré le fait que le rythme des sorties s' était considérablement ralenti. Comme nos chers élites gouvernementales, les mastodontes de la critique s' arc-boutent sur leur petit monde et nous offrent leur pathétique vision bas du front. Et les gentils mais idiots Idles de se présenter comme des contestataires sauveurs d'un monde déjà happé par le passé. Donc DWTN se devait de revenir et en pleine forme. Quitte à remuer sévèrement la bulbe qui a du se coller aux cranes de certains. Déjà qu' avant le Covid les vieux réflexes étaient difficiles à oublier, cette époque post-traumatique paralysante semble nécessiter un traitement énergique. Et en matière de laboratoire à la pointe du progrès en création musicale DWTN connait la bonne adresse. Direction l' Afrique et plus particulièrement Kampala en Ouganda encore une fois. Vous l' aurez compris chers habitués, on va encore parler du label Nyege Nyege Tapes. Pour les retardataires faut aller voir ici en passant par là chez les petits frêres d' Hakuna Kulala.


Commençons avec la première phase de traitement. Celle déjà connue donc la plus soft. Nyege Nyege en cette triste rentrée virale partouzarde nous a enfin offert le disque Gqom que l' on attendait plus chez Gqom Oh!. Une compilation prodigieuse du trio pionnier Phelimuncasi dans laquelle notre chouchou Munzi écrase encore la concurrence dans le rôle de producteur. Entre vieilleries et productions plus récentes les titres du trio vocal composé des frangins Makan Nana et Nera accompagnés de Malathon nous offrent une nouvelles preuves de la richesse de la scène de Durban. Aux côtés de Menzi pour les accompagner on croise DjMP3 et Dj Scoturn pour développer les ambiances cyberpunk indus et les mêler aux coutumes africaines. Quand la musique africaine se teinte une nouvelle fois d'une aura dark et dystopique on imagine déjà les yeux écarquillés des entartrés du bulbe que j' évoquais précédemment. Alors la suite qui va venir et c' est coma assuré. Peut être plus que chez les confrêres du label Gqom Oh! et tout ce que j' ai chroniqué depuis des années ce Gqom dévoile réellement l' art du toasting Sud-Africain utilisant la conversation et fortement imprégné de la tradition vocale développée sous l' apartheid. A la suite ce dernier disque il ne faudra ne pas oublier de repasser chez Gqom Oh! afin de jeter une oreille sur une autre compile Gqom dans laquelle on retrouve nos vieux amis Citizen Boys et Mafia Boys.






Après le traitement léger, la chimio pour esprits étriqués. Et si on parlait de ... "CRÉOLISATION"(*) musicale.

*: Plus d' info ici, pour l' actualité du sujet et par là afin de comprendre que cette magnifique chose rencontre des dangers en création artistique. Dangers si souvent abordés ici .


En matière d' attaque et de richesses sonores le groupe dont on va parler a plié le game 2020. Nyege Nyege ne cesse donc de tordre le cou aux idées préconçues issues de l' héritage coloniale chez les occidentaux et détruit leurs faux semblants et fausses consciences. Certains sont bien plus enfermés dans leur bulle qu' ils ne le pensent ou voudraient le faire croire. Depuis 2017 le catalogue Nyege visite une grande partie de l' Afrique de l' Est en quête de musiques à la fois porteuses de l' héritage mais également totalement moderniste et innovatrice. Par exemple le territoire historique est souvent post 90's quand l' électronique avait infiltré les traditions assez fortement. Donc pas vraiment de proto électronique africaine chez Nyege. Le curseur ne remonte pas à la nuit des temps et l' histoire en musique ne s' est pas non plus arrêté vers 2000 comme certains le laisseraient penser. Leurs sorties sont ainsi la réponse parfaite au culte des vieilleries discographiques de ce continent qui pullule en Europe. Parce qu'il faut bien comprendre qu' il y a chez certains un petit problème dans leur passion de la musique africaine. Pour faire court, quand un type comme moi se pointe et constate qu' ils vivent dans une niche ils ne comprennent que stylistique et avec tout l' art snobinard et bourgeois du mépris qui les caractérise me balance leur bagage culturel de la musique africaine vintage. Ou parfois ses versions rétros contemporaines. Et c' est bien là tout le problème. La pseudo ouverture d' esprit stylistique ne pallie pas les tares de l' étroitesse nostalgico-gaga qui indique beaucoup sur certaines attitudes provenant d' une paralysie et refus du futur. A ne pas se pencher sur l' Afrique contemporaine on se contente d' une vision passéiste propice à certains réflexes. Volontairement ou pas, on interdit toutes évolutions possibles aux africains et déjà certains hypocrites ou idiots vont vous balancer la tarte à la crème de l' authenticité quand vous leur ferez découvrir le groupe qui va suivre. Se rendent-ils compte qu' ils méconnaissent totalement comment l' humanité s' est construite? Que par mégarde les effets de leurs actions et pensées flirtent dangereusement avec ceux de la pensée raciste et réac? Finalement on comprend mieux que certains ne comprennent pas le terme de "créolisation" pensé par Edouard Glissant. Et pas que dans le camp que l'on croit.

"Je peux changer en échangeant avec l' autre sans me perdre ni me dénaturer"

Edouard Glissant

Alors bien sûr quand certains apprennent que les protagonistes formant Duma sont issus de ce qu' ils jugeront comme "étonnante" scène métal de Nairobi au Kenya ça peut en laisser plus d'un sur le carreau du réflexe "colonisation culturel" et " perte d' authenticité". Faut déjà remarquer qu' une scène Métal Kenyane paraisse "étonnante" à un occidental en 2020 appelle à la réflexion sur l' incapacité de certains à se rappeler qu' internet et ses capacités de partages mondiaux ont plus de vingt ans voir carrément, leurs préjugé sur les capacités africaines à utiliser le net.

Je vous avais prévenu, gratter de plus prêt nos réflexes en matière de musique trahissent bien la persistance coloniale dans les esprits.


Donc voici Martin Kanja et Sam Karugu qui adorent faire du boucan de tous les diables avec leur guitare et développer leurs capacités vocales en matière de cri gutturaux. Mais pas que! Ils sont aussi dotés d' une ouverture d' esprit stylistique que bon nombre d' européens devraient envier. L' électronique déboule alors avec des traces de culture dancefloor. Et c' est là qu' entre en jeux le concept de créolisation avec ce qu' elle signifie de plus important. J' emploie pour la première fois ce terme mais je m' aperçois que si elle brille actuellement dans le domaine sociétale et politique elle est au cœur de la plus part des chroniques de ce blog depuis 2012.

Duma hybride à ces deux influences occidentales leur héritage rythmique africain. Passé comme présent. Voir carrément mondiale avec des traces de footwork par instant. Mais il ne s' agit pas seulement d'une simple hybridation comme souvent avec les artistes de la musique indie tant défendus dans les gros médias.

Glissant selon Loïc Céry " insiste toujours sur la différence de la créolisation avec le simple métissage, qui crée du prévisible, de l' hybride, alors que la créolisation procède d' une mise en présence de différends apports culturels, créant de l' imprévisible"


Sur le papier la musique de Duma devrait être du Doom Métal avec de vagues rythmiques africaines. Deux choses totalement identifiables et l' écoute n' apporterait qu'une simple addition. En réalité les 9 titres sont étranges, inclassables et totalement novateurs. Les Duma dépasse la simple addition stylistique. Le dialogue acoustique-électro qui les caractérise révèlent des territoires insoupçonnés jusqu' à présent. Ce premier album éponyme éblouit par sa puissance, réveille par les surprises et la richesse de la palette sonore que dissimule le mur du son en apparence insondable à la première approche. Les voix passent par le registre Métal, chopent la culture africaine et termine au final en terra incognita. Par contre jamais les Duma assomment l' auditeur. Les 9 titres ne semblent pas être de simples variantes comme il peut souvent le sembler aux novices avec ce courant musical en général. Le résultat prouve que les deux gars ne "trichent" pas, ne se contentent pas d' étaler un savoir mais ont réellement décidé de laisser libre cours à leur imagination. Leur musique est ainsi l' une des plus étranges et novatrice parce que surtout c' est "LEUR" musique. Pas celle des autres. Et bien sûr avec un talent certains.

On peut certes par instant penser à d' autres artistes africains faisant dans la créolisation comme Faka ou encore les Metal Preyers signés eux aussi chez Nyege Nyege mais en définitive Duma trace avec ce premier disque un chemin que personne n' avait suivi auparavant. ESSENTIEL !!!






PS: 2020 est d' hors et déjà assurée d' être l' année Nyege Nyege/Hakuna Kulala. Aux albums de Dj Diaki, Phelimuncasi et Duma, Nyege Nyege va bientôt nous faire planer en offrant leur vision du psychédélisme à grand renfort de nappes de synthé, de techno et de rythmiques africaines. Ce sera avec le premier LP de HHY & The Kampala UNit. Quant au petit frêre de Hakuna Kulala il va sortir le premier album du catalogue des deux labels d'un non africain, le "Ngoma Injection" du russe Wulffluw XCIV. Nouvelle créolisation à base de EBM, Gqom, Kuduro et de Dumbow.



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