CAROLINE, déconstruction et expérimentation Post Rock.
- Jojo Lafouine
- 29 oct.
- 3 min de lecture

Le premier album s' était lentement fait une place dans les cœurs sans toutefois bouleverser et détoner . Trois ans plus tard le suivant propulse ce collectif en tête de la scène musicale britannique.
Basés à Londres Caroline formé en 2017 s' est fait une place progressivement et a fait preuve d' une certaine lenteur dans sa progression. 5 années se sont écoulées entre les débuts et le premier album, laps de temps assez grand pour notre époque. L' acte inaugural grand format resituait sur la cartographie musicale le Post Rock à l' instar de leurs voisins Squid (ici). Un Post Rock sous forte influence Folk d' avant garde. "Caroline" présentait des compositions provenant principalement d' improvisations.
Si il avait ses charmes ce disque pouvait toutefois se révéler pataud dans sa volonté de fusionner Folk, Post Rock, Chamber Music. Les boucles d' improvisation semblaient revenir trop fréquemment et cacher un petit manque de travail nécessaire en terme de songwritting. Avec le tout autant sobrement nommé "Caroline 2" nous assistons encore à une collision des périodes et des espaces mais cette fois ci mieux maitrisée grâce à un perfectionnisme et une inventivité assez inédits chez eux. Ce qui paraissait naviguer à vue, tourner en rond, prend à présent l' apparence d 'un cap sûr, d' une volonté à toute épreuve d' aller dans une seule direction. L' expérimentation. Et ce avec une méticulosité précieuse.
Si je pouvais les taxer autrefois d' un certain conformisme Post Rock, à présent, leur musique se révèle définitivement iconoclaste. Les structures ne semblent jamais définitives mais cela est cette fois volontaire. Assumé. Les titres ont ce goût d' inabouti pouvant déranger mais progressivement cela donne l' illusion que nous les croisons qu'un instant en prenant conscience qu' ils continuent d' exister par eux même dans un ailleurs inconnu. Cela drape ainsi cette musique d' une étrangeté charmeuse. Déconcertante mais laissant une très forte empreinte.
On a souvent entendu certains s' autoproclamer les enfants spirituels de Brian Eno avec son concept du studio comme instrument. Beaucoup de paroles mais très peu suivies dans les actes. Avec Caroline ce n' est pas du baratin. "Coldplay Song" en est le plus parfait exemple. Nous entendons 4 membres commençant le titre quand le producteur déplace le micro pour changer de pièce afin de retrouver les autres membres offrant leur version dans une autre pièce. L' environnement et l' espace (craquements de parquet, son des premier qui s' éloigne) font irruption dans la chanson. Cela peut évoquer l' une des premières représentations de la pièce silencieuse de John Cage "4'33" quand par exemple le silence (volontaire) qui s' était emparé de la salle laissait place aux bruits de la pluie sur le bâtiment.
Chez Caroline les guitares paraissent défaillantes et jouent avec la vitesse, accélérant et décélérant alternativement. La batterie quant à elle s' avère plus gaillarde mais maitrisant mal sa vitesse également. La production est ici d' une finesse rare. Les voix alternent les solo et les chorales, délivrant des paroles tenant plus du mantra que des Pop songs classiques. Ce sont assurément de très bon musiciens mais jamais la virtuosité prend le pas sur le reste. Ils l' utilisent sans se sentir obliger d' en faire des tonnes et excellent plutot par la volonté et leur savoir faire dans le fait d'unir et disposer leurs instruments.
Donc loin de se la jouer branleur avec en prime un certain sens de l' humour par leur choix de titre ("Coldplay Song" et "Song Two").
C' est une vrai travail d' orfèvre porté sur la déconstruction des cultures Folk et Post Rock. Ils réassemblent mais en laissant paraître les coutures volontairement grossières et l' ensemble devient à la fois touchant et bluffant. Véritable lâcher-prise des dogmes qui ne peut que faire penser à Mark Hollis de Talk Talk ou Broken Social Scene. En opérant des virages à 180° les titres peuvent alterner sans prévenir minimalisme et maximalisme, dépouillement et grandiloquence, évoquant ainsi un croisement improbable entre Talk Talk et Sigur Ros.
A suivre de très près.













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