Très étrangement l' artiste dont il va être question ici a déjà été croisé il y a peu de temps sans réellement laissé une grande trace. Ce qui n' était absolument pas le cas du disque auquel il a avait collaboré. Faut dire que le tonitruant "Terminal" de l' égyptien Zuli (par ici), était tellement riche de pépites que le titre auquel l' artiste du jour prêta sa voix semble être resté noyé au milieu des mille et unes merveilles. Petite injustice vite réparée quelques mois après grace à son premier disque solo. Une énorme claque susceptible de faire perdre tout repère musicaux, géographiques et temporelles. Un peu comme si après le décès de Scott Walker un type vient voir le fan attristé de l' américain pour lui chuchoter à l' oreille qu' il pourra se consoler et retrouver un peu du frisson Walker des dernières années auprès d'un disque fait de chant arabe reluquant l' ère pré-coranique, le post-club, le post-grime d'un Logos et l' indus de Coil. ET qui plus est, ne provenant pas des States, d' Angleterre ou de Berlin mais bel et bien produit ...à la Mecque, Arabie Saoudite. Msylma est un producteur et chanteur qui nous vient donc d'un l'un des lieux saint de l' Islam. Repéré en premier lieu par Zuli et sa clique du Caire le bonhomme sort finalement son premier album chez l' un des plus rafraîchissant label du moment et les plus adulés par ici, Halcyon Veil. Je pourrai encore une fois vous pondre le sempiternel chapelet sur les bienfaits d'une mondialisation pas si malheureuse que ça via les réseaux sociaux et les plateformes de partages en matière musicale. Vous ressassez aussi qu' à présent que la modernité n' est plus l' apanage de l' occident, comprenez Europe et Amérique du Nord, l' hybridation produites par des influences plus vraiment surprenantes par leur destination "imprévues" est en train de redessiner la carte musicale mondiale en matière d' innovation et de merveilles originale. Bref, cessez de regarder encore une fois dans les même directions et apprenez à guetter le globe en abandonnant si possible les habitus du petit blanc en mal d' exotisme musicale bien souvent conjugué qu' au passé. En résumé si en 1994 tu zieutais Sheffield en attente d' une sortie chez Warp d'une probable tuerie électro futuriste bien barrée c' est à présent dans tous les endroits les plus inimaginables que tu vas retrouver le chemin du futur. A la différence d'un Zuli qui refuse dans sa musique toute forme d' exotisation facile à force d' expurger sa musique de traces trop visibles de sa culture et histoire celle de Msylma nous offre tout un pan de sa culture facilement identifiable. Et malgré celà la performance réalisée par Zuli en matière de modernisme est égalée. On peut par fainéantise vous décrire son disque comme le parfait croisement du presque voisin (Syrie) Omar Souleyman avec les velléités modernistes de la Koweitienne Fatima Al Qadiri. J' ai bien écrit par fainéantise parce que Msylma n' est pas une simple addition des deux artistes ou une énième recette facile de tuning moderniste à la va vite. Le bonhomme dont il est impossible de trouver une photo le représentant sur le web est du genre original, cultivé et consciencieux. Au point d' aller dans les tréfonds de l' histoire de son pays ses sources d' inspiration. Si bien sûr une certaine mystique croisé au travers du Coran imprègne son œuvre il faut aussi déplacer le curseur bien avant l' apparition de cette religion en matière de culture et de poésie. Les rares qui ont pu traduire les paroles nous informent que "Dhil-Un Taht Shiparat" raconte les affres de l' arrivée à l' âge adulte après avoir évoquer l' enfance et les déchirements de l' adolescence. Mais une fois cela appris je peux vous affirmez qu' il vous sera inutile de passer par des cours du soirs an arabe classique tellement la voix du bonhomme comporte une charge émotionnelle suffisante pour transmettre ce que son auteur veut. La voix de Msylma est une vrai bombe à fragmentations affectives. C' est peut être ça en premier lieu qui a fait rapprocher le Saoudien de Scott Walker chez les chanceux qui sont tombés dessus. Par sa seule voix Msylma développe un imaginaire puissant où le désespoir teinté d'un terrible pathos et d'une angoisse étouffante peut rapidement se transformer chez l' auditeur en une poussée d' espoir tout aussi forte et un bien être total. Si la voix semble être le réceptacle du passé la musique quant à elle est bel et bien symptomatique de notre présent et de qui se fait de plus aventureux de nos jours. On peut toutefois comme chez Al Qadiri et Souleyman retrouver des mélodies facilement identifiable comme provenant du Moyen Orient avec des orgues eux aussi fortement romanesques. Mais ces artefacts se voient catapulter dans le futur par une électro tout sauf vintage au contraire de celle de Souleyman. Il y a des traces du grime des origines mais surtout on se retrouve face aux climats Weightless avec une certaine qualité spectrale développées chez un Logos ou un Visionist et fatalement Fatima Al Qadiri. A ceci on peut rajouter l' irruption de bruits corrosifs qui tiennent autant de la noise que de l'indus. Cette spécificité le fait immanquablement à l' instar de Zuli rapprocher de la deconstructed club du tenancier de son label, Rabit. On peut s' étonner de sa non présence dans le collectif de Chino Amobi, NON Worldwide. Msylma réussit avec ce premier album l' une des plus parfaites combinaison de traditions ancestrales avec une sensibilité hautement moderne. Il dépasse ses influences modernes en déplaçant son regard encore plus loin dans l' avenir en se reposant sans les trahir sur ses traditions. Après une année 2018 déjà faste Rabit et son Halcyon Veil nous offre en ce début d' année une autre merveille qui risque de surprendre plus d'un dans le conformisme ambiant occidental.