Une fois n' est pas coutume DWTN se penche vers le passé. Un bond de 20 ans en arrière exactement. 1998 ? Une année pas si anodine que ça.
Bien sûr 98 signifiera fatalement quelque chose à tous ceux vivant en France sauf si ils se terraient au fond d'une grotte. Les chanceux ! Pas réellement de rapport avec la musique si ce n'est deux biens curieux retours au sommet des charts français. Au point d' exploser les chiffres de leurs sorties originelles. Méprisés ou oubliés un temps puis devenu culte en un instant. Phénomène appelé à se reproduire bien des fois par la suite au sujet de l' indie music et de ses légendaires formations. Pour beaucoup le titre symbole de 98 c' est la scie disco "I will survive" mais en ce qui concerne votre serviteur ce sera "Atomic" de Blondie qui sert de clé à la malle aux souvenirs ambigue de la "grande illusion" nationale de Juillet 98.
Mais on peut toutefois rajouter une petite chose en apparence extra-musicale mais qui changea pas mal la donne en musique. 98 voit la naissance de Google boostant encore plus l' essors d' un truc appelé internet. L' année suivante ce sera le site de téléchargement illégal Napster et plus rien ne sera comme avant. Ainsi en 1998 l' industrie musicale se goinfre encore s' en réellement voir ce qui lui pend au nez. Youtube n' existe pas comme également les sites de référencement. La musique se conjugue donc encore et plus que jamais au présent voir au futur et la nostalgie et les revivals ne sont que des épiphénomènes générationnels (les vieux) ou pour quelques gamins un tantinet réac et à la recherche d'une quelconque authenticité. Faut-il encore s'en donner la peine. Les 90's ont vu l' art du sample triompher et certains semblent le regretter ou, à l'instar du capitalisme face à la chute du mur de Berlin, de décider de la fin de l' histoire en lui accolant vicieusement le terme post-modernisme (cf cette chronique qui dévoile le tour de passe-passe d'une certaine critique en voie de replie sur soie et ses référence). En fait l' art du sample n' était pas fondamentalement ce que certains sous-entendaient, un recyclage facile du passé ne créant rien et un statu-quo créatif. Il y a aussi derrière tout ça un petit relent de la vieille guéguerre entre musiciens et "non -musiciens".
En 1998 on est au sommet de la vague Trip Hop (Massive Attack) , l' électro et sa culture dancefloor n'en finissent pas d' envahir le monde et d' innover. La Drum & Bass explose du côté de Bristol , le feu jungle n'est pas encore éteint et l' IDM (Autechre, Boards Of Canada) tutoie les sommets de territoires inconnus et merveilleux. Le glitch (Pole,Fennesz) et la minimal techno (Plastikman) emboîtent le pas et l' ambient se mêle à tout ce qui passe sur le dancefloor (Gas). Tout ces nouveaux styles ne restent pas dans leur niche et continuent à muter et à se développer dans un mouvement perpétuel (Leila) contre la muséification dont d' autres commencent alors à être atteints .
Les guitares indies semblent quant à elles être un peu en recule artistiquement même si elles semblent avoir encore la patate (commercialement) après la vague Britpop et ses derniers grands spasmes (Pulp, Black Box Recorder). Sans parler de l' apparition de l'overground avec le succès publique d' artistes underground tel Radiohead ou l' irréel présence d'un Elliot Smith perdu sur la scène des oscars. L' indie n'est plus le truc des "bizarres" et se trouve un nouveau publique comme le démontre le succès de la Route du Rock en cette même année. Pas sûr qu'un certain publique "indie" apparu à l' époque comprenne bien les histoires de loosers comme Smith ou Sparklehorse. Ils leur arrivent même à ces déjà très vieilles guitares et à l' esprit indie de se montrer optimistes et ouvertes d'esprit en copulant avec l' électronique ou d' autres genres (The Beta Band, Lo Fidelity Allstars). Même Massive Attack vient les sauver par l'intermédiaire de ses gènes post-punk Bristoliens mais elles semblent également se recroqueviller sur elle même et ses références historiques (Placebo). On peut ainsi traduire certains disques indie comme des crispations venant d'un pressentiment concernant son avenir, d'une gueule de bois post Britpop et dans la foulée d' un début de nostalgie envers le passé glorieux de la pop des 60's et 70's. Et vas-y que l'on se remémore le psychédélisme baroque (Mercury Rev) ou les grandes heures d'un Scott Walker (Pulp) et d'une certaine idée de la variété française de qualité (Air) Quand au "rock" et bien on s'en passe très bien et si jamais quelqu'un ose en refaire (Jon Spencer Blues Explosion) alors celà a tout au plus à nos oreilles que le goût exotique de la madeleine de Proust. Bref, un truc gentillet anachronique à ne pas oublier mais pas non plus à singer jusqu'à en faire devenir la norme. De toute façon en 1998 on parle pas de rock quand on vit avec son temps, on parle de post-rock (Tortoise, Gastr Del Sol et leur père à tous, Mark Hollis). Le rap lui a de toute façon mis une sacrée raclée et commence le squat des hit mondiaux (Beastie boys, Outkast). Comme autrefois l' illustre Robert Johnson les guitares se retrouvaient à nouveau face à un crossroad et devaient choisir. Manipulation et croisement génétique (Sonic Youth) ou consanguinité (Gomez). Malheureusement les choix faits par certains entraînèrent la "réaction" rock des 00's avec ses revival et son culte du vintage à gogo sans courage artistique qui polluèrent tous le reste.
En fait en me replongeant dans 98 j' ai la curieuse impression que juste après 1997-2001 tout se gela en terme de nouveauté. On était rentré dans un âge glaciaire infécond pour la nouveauté. Il faudra attendre le dubstep et certaines autres choses vers 2007 pour assister au dégel et la réapparition des bourgeons de l' innovation. Visiblement certains sont encore pris dans les glaces du passé et si par chance elles fondent c' est de bien tristes et totalement déconnectés hibernatus qui squattent les scènes.
1. MASSIVE ATTACK Mezzanine
20 ans après face à ce subtil et toujours aussi moderne mélange de Trip Hop et de l' esprit post-punk avec ses guitares revivifiées on peut franchement rire du terme de post-modernisme accolé par certains idiots en voie de sénélité qui s' empressent de nous vendre à longueur d' année le premier pastiche venu des Smiths ou du tandem Bowie/Eno.
2 ex aequo. AUTECHRE LP 5 & BOARDS OF CANADA Music has the right to the children
Quoi dire sur ces deux monstres étiquetés IDM ? Rien si ce n'est qu'ils ont été et restent essentiels pour s' ouvrir l' esprit et aller voir ailleurs plutot que rester dans la seule niniche indie. Et qu' aussi 7 ans après sa mort décrétée par la presse et les artistes Britpop le shoegaze revenait par la petite porte en dévoilant son influence appelée à devenir immense sur des artistes éloignées des guitares.
4. THE BETA BAND The Three E.P.'s
L' un des groupes les plus sous-estimés des 90's. Ne cherchez pas leur meilleurs album studio c' est bel et bien cette compilation d' ep qui constitue le chef d' oeuvre de leur carrière. "Dry By The Rain" restera à jamais l'un des plus grands titres de l' histoire et tout le reste ,certes moins connu, est du même acabit. Un psychédélisme revenu de l' au delà ne sombrant jamais dans le cliché en développant un modernisme hallucinant à grand coup de métissages stylistique, de trouvailles mélodiques et d' une douce et enfumée folie. Tame Impala n' aura jamais cette folie et les Thee Oh Sees leur intelligence et ouverture d' esprit.
5. LO-FIDELITY ALLSTARS How To Operate With A Blown Mind
7 ans après et surfant sur le phénomène BigBeat et publié par son label phare Skint Records (Fatboy Slim) une bande de lads décida de réanimer Madchester. Et par une sorte de miraculeux crossover trans sociétal et musical comme seule l' Angleterre avait le secret en ces temps lointains les Lo Fidelity Allstars transporte le son Baggy du début de la décennie vers le futur et les terres avoisinante de la Drum & Bass et la culture dancefloor. On dit souvent qu' Oasis était à la fois le dernier chapitre de la glorieuse histoire Mancunienne et le "dernier grand groupe de rock". Faux! C' était ces branleurs-là à quelques petit détail près. Ils n' était pas de la cité du Nord mais en revendiquaient l' héritage avec honneur, il n'y avait pas de guitare (!) et l' expérimentation remplaçait l' érudition. La leçon sera perdue et un petit con de New York aura beau jeu de nous faire ingurgiter une version post punk datée du crossover dans les 00's. Bref, LCD Soundsystem à côté des Lo Fidelity Allstars,
c 'est la version Disney.
6. ELLIOTT SMITH XO
Souvenir de vieux con. Je l' ai croisé à cette époque du côté de la Villette et en quelques seconde ce type d' apparence bourru par une fragilité sidérante dès le premier regard vous émouvait au plus profond de votre âme sans que sa petite célébrité indie y soit pour quoi que ce soit.
7. POLE 1
"Quand un bruit vous ennuie, écoutez-le!" John Cage Même sur un dancefloor? Le glitch et la minimal Techno des Pole, Fennesz et Plastikman qui ennuyèrent tant certains de mes contemporains indie ont été les seuls lumières du futur à nous éclairer au début des 00's. A présent ils adorent mais refusent promptement de l' écouter quand ils se conjuguent au présent et qu' ils mutent. Autre exemple de l' effet pervers de la muséification et du référencement par internet des vieilles passions musicales devenue culte
8. LEILA Like Weather
Bjork avait déjà le don de trouver les pépittes et l' avenir là où on ne les attendait pas, l' Iran.
9. BLACK BOX RECORDER England Made Me
Si 2018 a King Krule 1998 avait les plus sensuels mais aussi plus vicelards Black Box Recorder. Un trio magique formé par Luke Haines (allumeur puis observateur et contradicteur de la Britpop), John Moore (ex Jesus & Mary Chain) et Sarah Nixey. Nixey avait le don magique de chanter comme les chanteuses Gainsbourienne les saloperies que Haines discernait dans la société anglaise.
10. Exaequo PJ HARVEY Is This Desire & PULP This Is Hardcore
Bon ces deux-là on ne le présente pas. A ma gauche les vrais vainqueurs (artistiquement parlant) de la Britpop et du duel débile Oasis/Blur et à ma gauche la co-souveraine des 90's et des 00's avec Bjork. Point commun des ces disques sorti en 98, ils ne sont pas considérés comme les meilleurs de leurs auteurs mais 20 ans après, les faits sont là. Si PJ Harvey ne semble que s' auto-parodier et abandonner l' expérimentation "Is This Desire" damne le pion à toutes ses fifilles revendiquée que notre présent bégayeur nous offre. Le grand Jarvis Coker quant à lui surprit par ses velléités Walkeriennes (Scott) et Bowienesques encore plus assumées. "This is Hardcore" constitua une douche froide après le succès de "Different Class" et la fiesta qui accompagna leur tournée mais quoi de plus excusable pour un groupe qui avait tant ramé auparavant et constitue à l' échelle britanique l'un des plus parfait exemple de l' overground. Malgré quelques titres typiquement Britpop et euphoriques, parfois un brin caricaturaux dans l' évocation de leurs deux précédents classiques, il s' avéra immédiatement comme le clap de fin de l' euphorie Britpop. Coker empêtré dans la cocaïne et la célébrité devait également avec Pulp faire face au départ de l' autre génie du groupe Russel Junior, probablement le plus innovant et lucide de la bande. Le son se fit donc plus classique faute de Senior et de ses tours de passe-passe modernistes, les parole plus violentes et pessimistes. Cocker avait vu avant tout le monde que Tony Blair allait vite tuer les espoirs à grand coup d' arnaque Socio-libérale, le sex prenait l' apparence toc des sitcoms hollywoodienne et on abrutit le bon peuple à grand de pleurnicherie via la "vraie" première télé réalité, Lady Diana.
12. MERCURY REV Desert's Songs
13. PLASTIKMAN Consumed
14. MARK HOLLIS Eponyme
15. TORTOISE TNT
16. GAS Zauberberg
17. GASTR DEL SOL Camoufleur
18. BEASTIE BOYS Hello Nasty
19. WINDY & CARL Depths
20. NEUTRAL MILK HOTEL In The Aeroplane Over The Sea
21. SPARKLEHORSE Good Morning Speeder
22. AIR Moon Safari
23. OUTKAST Aquemini
24. SONIC YOUTH A thousand Leaves
25. ARAB STRAP Philophobia
L' INCLASSABLE DISQUE GENIAL CAR JUGE TROP DANGEREUX POUR VOTRE SANTE PSYCHOLOGIQUE
COIL Time Machines
J' en ai déjà parlé mais si vous connaissez pas ce disque jetez-vous dessus. En à peine quatre titre nos deux cinglés vous détruise le cerveau à grand coup de boucles hypnotiques et empoisonnées.
LES MYSTERES DES 90's Mais comment a-t-on pu les aimer ou ...y croire un seul instant?!
GOMEZ Bring It On Alors eux ce sont bel et bien le prototype absolu de tous les revivalistes de la décennie suivante. Relecture poppy et aseptisée de tout ce qui a précédé le punk en se référant au blues des origines. Faire comme si de rien n' était et offrir une sorte de muzzack passe-partout déguisée sous des lambeaux d' authenticité.
EELS Electro-Shock Blues
PLACEBO Without You I'M Nothing
Un premier album surprenant puis la caricature et une certaine propension à draguer les FM de tout pays auront raison du beau Brian. Malgré l' adoubement d' un Bowie alors un brin largué et en mal de reconnaissance de l' alternative de l' époque et de la jeunesse, Placebo restera faute de réel innovation et curiosité l'illustration 90's parfaite du proverbe, "n' est pas Bowie qui veut!".
UNE SI BELLE HISTOIRE QUI SE TERMINA EN EAU DE BOUDIN.
THE BOO RADLEYS Kingsize
Groupe maudit par excellence et donc lui aussi l' un des plus sous estimés des 90's comme les Beta Band. A la différence c' est que ces derniers bénéficient d'un statut culte avec adoubement comme il se doit des curateurs incultes ricains de Pitchfork. Visiblement les Boo Radleys n' ont pas du être écoutés de l' autre côté de l' Atlantique. A peine 40ème dans le top Britpop et côté top shoegaze "Giant Sant" se hisse péniblement à une honteuse 25 ème place. Quant à " Everything's alright forever" il est perdu dans les limbes du passé. Ces deux disques dans un monde meilleurs devraient cotoyer la fine fleur de l'indie 90's, les Pulp ou Oasis Britpopeux, les My Bloody Valentine et Ride shoegaze. Mais seulement voilà, Martin Carr et ses potes n'ont jamais voulu choisir de niche et le facile à ranger dans les rayonnages de la grand musée musical mondial. Plutot adepte du crossover et du renouvellement. Tout ce que les ricains de Pitchfork n' aiment pas trop et tentent de la cacher en misant sur une diversité stylistique feinte mais foncièrement créatrice de communautarisme. On écoute du rap et du rock indie mais surtout pas mélanger et encore moins avec tout autre chose. Avez-vous remarqué que sous la dictature hipster, vintage et Pitchforkienne l' exercice du crossover réel tente à disparaître ou qu'il ne se doit de n'être que conjugué au passé ? Début noisy et shoegaze ( "Ichabod and i" & "Everything...") puis premier virage dub avec Giant Step, nouveau virage britpop et grand publique avec "Wake up !" et enfin retour dans l'underground arty et noisy avec "C'mon Kids". "Kingsize" est leur dernier album et franchement prend souvent l' aspect d'une douloureuse agonie entre coupée de moment de grâce. C' est aussi le plus parfait des résumé d'une carrière riche en diversité stylistique et en pépites mélodiques. Si il y a une chose que l'on ne pourra jamais enlever aux Boo c'est bel et bien ce don typiquement Liverpoolien pour la mélodie. Ici le lyrique, pompier un brin mais franchement déchirant "Kingsize" se classe comme l'une de leur meilleur pépitte. On a même droit à un hommage émouvant à une de nos célébrité hexagonale. Si si ! Le beau "Adieu Cloclo". Les petits ratages se succèdent aux derniers exploits de valeureux guerriers de la cause indie à qui personnes semblent réellement vouloir offrir les hommages qu'ils méritent.
LE EP QUI VAUT TOUS LEURS ALBUMS (dont une sacrée blague autrichienne anti rétrogaga nostalgiques)
SUPER FURRY ANIMALS Ice Hockey
Oser ne mettre que sur un ep l' un de ses plus beaux titres. Arcade Fire et consors vont pas comprendre le panache gallois.
FENNESZ Plays
Intituler ses deux premiers titres électro parus en singles du nom de grands classiques rock et pop et ainsi tromper les gogos réacs en offrant non pas de sage relecture mais un véritable travail de déconstruction innovant, voilà de quoi nous faire aimer le bonhomme et lancer sur les rail une carrière qui allait tutoyer les sommets Glitch et autres.
LES 2 TITRES ADORES DONT ON N'A ABSOLUMENT PAS HONTE ! Et on avait de bonnes raisons. Pas toujours musicale je le reconnais!
STARDUST Music Sounds Better With You THE CARDIGANS My Favorite Games
FRENCHY BUT CHIC
NTM SUPREME NTM Rarement entendu avec mes amis indies mais passionnément et intensément une fois rentrée à la maison.
Depuis eux aussi sont devenus cultes même chez ceux qui ne les supportaient pas.
YANN TIERSEN Le Phare
MANU CHAO Clandestino Deux disques géniaux mais trop entendus et maintes fois copiés dans le désert musicale français jusqu'à en devenir des caricatures malheureusement.