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Nico

DIJIT, fumée bristolienne sur Le Caire. Quand le Trip Hop redevient moderne là où on l' attendai


Imaginez que vous vous retrouvez confiné dans un modeste appartement de la banlieue du Caire ces derniers jours. Engourdie par une chaleur récemment réapparue, vous êtes affalé sur un canapé vétuste. Noyé bien sûr dans la fumée d' une chicha dont vous ne pouvez plus vous passer. Et tout ça au son d' un vieux Portishead ou Tricky sur lesquels se superposent les sons modernes des radios locales et les appels des muezzins. Difficile cependant de se représenter cette scène allez-vous me dire. Tant elle se révèle à la fois fortement intrigante et incongrue. C 'est que vous ne connaissez pas Dijit. La gigantesque bourrasque d' air frais dans nos vies confinées de ce triste printemps 2020. Et le grand retour totalement inespéré et tout autant inattendu ,voir appréhendé, du Trip Hop dans nos vies de presque vieux ainsi qu' à la découverte d'un style échappé des griffes des revivals incessants de l'industrie musicale pour les plus jeunes.

Hashem L Kelesh aka Dijit est un artiste pluri-disciplinaire résidant dans la banlieue de la capitale Egyptienne. Méfiant mais engagé politiquement ce jeune homme d' à peine 30 ans produit de la musique depuis une dizaine d' années. Passé d' abord par un rock "Horrible" selon ses dires il s' est dirigé vers les sonorités plus modernes et permissives en matière d' expérimentation. Il se définit comme "un homme triste" fortement attiré par la création artistique portant sur le corps et le sexe. Il dit aussi vouloir créer "des illusions de sons et d' images qui, à sa grande surprise, plaisent à certaines personnes". Le label YOUTH d' Andy Lyster , déjà repéré pour l' excellent "Lo Tech" de L Lund l' an dernier, nous dévoile donc le merveilleux premier disque de Dijit, "Hyperattention Selected Dijital Works Vol.1" . Le nom du disque en forme de clin d' œil suffit à faire savoir quel est l' un des héros du bonhomme qui se revendique comme un autodidacte par internet. Et bien évidemment comme un fan d' Aphex Twin pour ceux qui connaissent pas l' un des disque les plus importants des 90's. Mais étrangement, ce qui rajoute à l' aspect mystérieux de ce machin, ce n' est pas de l'Idm de Richard D James qui est évoqué immédiatement à l' écoute du disque. C' est une évidence. Au Caire entre 2013 et 2018, un type s' est imaginé avoir un pied dans le Bristol des 90's et l' autre dans sa patrie agitée en plein Post- Printemps arabe. Et tout aussi étrangement, cela ne sonne absolument pas comme une réappropriation flemmarde d' un passé lointain chronologiquement (30 ans!) ainsi qu' exotique par son origine géographique. Dijit rénove le Tri Hop et ce d' une façon à la fois radicale et mesurée. Pour les lecteurs de ce blog le fait qu' en Egypte et le Moyen Orient la modernité soit vivace en matière de création sonore ce n' est pas une surprise. Loin de là. Zuli (ici) et Msylma (par là) ont déjà mis de sacrés coups de pieds au cul des a-prioris occidentaux. Dijit quant à lui réussit à totalement s' approprier le passé occidental et à nous le rajeunir d' une manière rarement croisée dans notre si vieille Europe. Bien sûr que l' auditeur va penser aux premiers Portishead ou au "Maxinequay" de Tricky ainsi qu' à Massive Attack période "Mezzanine". Les ambiances enfumées, flegmatiques et sobres virant plus rarement, mais parfois, à l' étouffant et l' angoissant cible tout un pan des 90's dans ce qu' elles avaient de plus passionnant et émouvant. Mais les aspects orientalisant et le gout de la modernité sonore issu de l' indietronica et l' IDM de la clique Warp vont irrémédiablement évoquer par affinité d' origine la grande Leila en plus des voisins Msylma et Zuli. A l' image de l' absence des craquements vinylesques typique du Trip Hop d' origine celui de Dijit, les remplaçant par des petites évocation numériques et digitales, est frais jusqu' à atteindre vicieusement l' hyper modernité du Post Club. Ce disque dont l' enregistrement s' est étalé sur 5 ans, est surtout le fruit d' un travail collaboratif entre un producteur lo-fi intransigeant et génial invitant ses amis à poser leurs voix sur ses productions. Et que le carnet d' adresse de Dijit est riche en talent vocaux et diversités. Tout comme ce disque appelé à devenir un classique de cette heureuse mondialisation moderne musicale passant sous les radars d'un occident musical indie à l' agonie à force de rétromanie. Merveilleux !

LE TRIP HOP EN QUELQUES MOTS ET UNE PLAYLIST

The Wild Bunch dans les 80's, Bristol.

Je pense que si pour les plus perspicaces c' est une évidence il faut quand même envers les plus jeunes le dire , la génération de votre serviteur a baigné dans le Trip Hop pendant les 90's. Grandi sous Madchester avec sa partouze rock indie et électro-dancefloor, témoin de l' apparition du Hip Hop plus tôt, donc déjà adepte du brassage stylistique et culturel, passant par le shoegaze novateur et l'IDM pour le goût des textures et l' abstraction, à mes yeux le Trip Hop était aussi important que tous les noms cités. Une musique totalement adapté au spleen post chute du Mur et triomphalisme révoltant du Capitalisme. Et bien sûr aux rites enfumés des post-ado. A la fois post-moderne par l' utilisation des samples du passé musical mais tout autant frais et novateur par ses manières et le rendu il se permettait d' être le passage obligé entre d' une part l' égocentrisme et le passéisme de la Britpop/rock si réconfortant par leurs aspects de madeleine de proust pour jeune en manque de révolution mais également et malheureusement indicateur d' un nombrilisme sociale et de race pesant. Et d' autre part, l' expérimentation futuriste radicale parfois intimidante de l' électro façon Jungle, Drum & Bass où ce coup-ci la mixité de race et sociale était la règle.

Le terme Trip Hop a été souvent utilisé à tors et à travers par la critique mais honnêtement ce style était aussi bien identifiable que difficile à cloisonner tant les variantes furent multiples. Dresser une playlist du genre en tentant de garder une certaine forme de purisme est une véritable gageure tant ce courant et ses artistes possédaient un goût certain pour le mélange des genres. Si les racines étaient bien évidemment à trouver dans le Hip Hop chaque artistes y a introduit ses marottes personnelles. Les 60's Baroque-pop, variétoches ou Soul pour leur goût affirmé des voix féminines, se confrontaient ainsi aux affinités plus récentes comme le Post-punk indus (Mezzanine) , techno ou indie rock voir jazzy. Bien évidemment la clique de Bristol est obligatoire mais le style a tellement influencé mondialement et culturellement que l'on peut autant le retrouver à peu près partout mélangé à d' autres styles multiples. Du rôle influenceur d'une Neneh Cherry au copinage avec Bjork et des tentations d'une frange indie (UNKLE) Aborder le Trip Hop sans citer DJ Shadow, si éloigné de Bristol est tout de même impossible tant sa musique partageait avec celle des anglais. Et que dire des catalogues Mo Wax et Ninja Tune pour des versions souvent instrumentales.

Voici une très longue playlist qui reflète cette diversité et la tendance hégémonique du Trip Hop a ruisseler un peu partout.

Et les éternels absents de Spotify

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