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Trish Keenan, Broadcast

Fontaines D.C., Porridge Radio & Idles: les bons, les gentilles et les idiots du Post-Punk



Quid des guitares post-COVID? Petit retour sur ce que je n' ai pas pu chroniquer cette année. Si les guitares semblent toujours à l' agonie en 2020 certaines tendances apparues auparavant se confirment. En gros c' est un certain revival post-punk qui domine permettant à ces artefacts du 20ème siècle de briller miraculeusement et même parfois, de faire espérer pour leur avenir.

LES GENTILLES

Des guitares toujours en recherche de tête de gondole ou devrais-je dire de messie. Et en la matière 2020 a débuté avec la grosse hype Porridge Radio. Véritable buzz chez les fans et les critiques jusqu' à ce que le Covid passe par là et perturbe franchement le lancement sur orbite de la tête de gondole. Porridge Radio nous vient de Brighton et comme tant d' autres reluque sacrément le passé. Plutot qu' être ennuyeux ce groupe dans une moindre mesure réussit le petit miracle entendu chez les post-punk Fontaine.D.C, Shame et The Murder Capital. Bref faire un petit peu de neuf avec beaucoup de vieux et offrir quelque chose d'un temps soit peu personnel. Comme chez les noms cités la musique de Porridge Radio lorgne sur le post-punk mais possède certaines particularités. L' une d' entre elles est un goût prononcé pour l' indie rock des 90's. Celui qui avait élu les Pixies plus grand groupe du monde et fait de PJ Harvey sa Sainte alors que Fontaines D.C. ont quant à eux une certaine prédilection pour le versant Britpop et ses singles susceptibles de sortir des rangs indies. PLus exactement Porridge pourrait passé pour les petites soeurs des plus récentes Electrelane. Des Electrelane plus radiogéniques et moins expérimentales avec pour preuve l' absences titres purement instrumentaux. Si Electrelane nous marquait par ses chœurs collectifs Porridge a pour figure centrale la voix de Dana Margolin. Une Dana Margolin qui vous touche en plein cœur avec ses phrases simples parfois répétitives et sa voix qui racle et déchire.

Margolin et son groupe vous plonge dans la complexité humaine d' une curieuse manière. Leurs chansons peuvent être à la fois brûlantes et impitoyables puis réconfortantes et cajoleuses. Porridge semble se dire que répéter sans cesse ce qui fait mal va avoir pour résultat d' hâter la résolution de nos problèmes. En parallèle le groupe via sa chanteuse nous apporte également quelques solutions simplissimes paraissant un poil trop évidente mais toujours pertinentes.


Les titres ont de sérieuses capacités en terme d' accroche radiophonique et d' efficacités mais sans suivre un seul et unique schéma facile. La panoplie stylistique est plus large que prévue sans que l'on se perde face à un son océanique où des courants chauds éclatants voisinent d' autres plus froid par épurement. Parfois le groupe se révèle plus enfumé et sombre avec des approches dub. Alors oui on est loin de la marge expérimentale du rock indie des 90's, Porridge Radio ne va pas aussi loin que Girl Band tel des Sonic Youth 2.0. Oui le côté lyrique de Margolin peut agacer, devenir la marque de fabrique un peu trop évidente et un simple produit d' appel. Mais leur quatrième album, deuxième réellement distribué, intitulé "Every Bad" constitue une bonne petite surprise laissant planer un brin d' espoir pour l' avenir.

LES IDIOTS UTILES DE LA LUTTES DES CLASSES

L' épineux cas Idles. Idles est devenu ces derniers temps sujet à controverse. On va parler musique bien sûr mais aussi de la polémique qui poursuit les Idles depuis quelques semaines. Le groupe subit les attaques de certains de leur congénères et pas des moindres. Plutot des types qui en ont dans le ciboulot. Cette polémique n'est pas à rejeter d'un revers de la main avant de se concentrer uniquement sur l' artistique et d' entamer la chronique du récent "Ultra Mono". Une polémique qui en dit long sur les déchirements et l' incompréhension qui règne dans nos sociétés.


Depuis ses débuts ce groupe a assumé et s' est revendiqué comme un groupe engagé et contestataire quite à en faire une véritable petite marque de fabrique relayée avec force par des médias énamourés. Quelques uns avait vite repéré que le discours Idles était un brin naïf façon "Miss Monde" quand ce discours suffisait à d' autres pour les propulser chef de file d' une contestation un brin caricaturale. Alors bien sûr un groupe agissant de la sorte doit s' attendre à un retour de bâton. Surtout si dès le début il existait certaines failles dans des fondations coulées un peu à la vite. Que des types issus de la Working Class tel Williamson de Sleaford Mods ou Lias Saoudi de la Fat WHite Family s' en prennent aux Idles plutot de classe moyenne n' est absolument pas surprenant. L' attitude et les façon de faire des Idles est une énième fois la preuve du complexe de supériorité dont est imprégnée la mentalité des classe moyennes. Parfois à leur insu et malgré toutes leurs bonnes volontés. Parfois...

Ce fut d' abord le bon Jason Williamson des Sleaford Mods qui après avoir apprécié les premiers efforts du groupe leur a balancé une assassine accusation d' "appropriation de classe" sociale. En gros ils la jouent Working Class mais sont bel et bien issus de la Middle Class. Est-ce que Williamson exagère? Peut-on y voir une espèce de réaction teinté de jalousie ou d' un sentiment proche du réflexe "chasse gardée"? Non parce qu' il connait son affaire et développe rapidement des arguments solides. A qui veut bien les entendre. Et Williamson de continuer à la situationniste sans le savoir au sujet du rôle de l' art musicale que les Idles jouent vraiment: "La musique ne peut pas résoudre les problèmes politiques. Et je pense que leur point de vue est cliché, condescendant, insultant et médiocre. Et c'est pourquoi j'ai un problème avec eux. "


Et on ne peut que le confirmer. Rabacher de la même façon un brin Dada parce que ça fait rire depuis trois albums les même sujets sans réellement faire évoluer sa pensée, et sa musique, devient un brin inoffensif parce que très vite caricatural et attendu.

Idles et ceux trouvant ces accusations illégitimes voir incompréhensibles n' ont toujours pas compris que l'on parle toujours du milieu où l'on a grandi. Qu' il en reste toujours suffisamment quelque chose pour biaiser la vision que l'on a des choses et qu' il faut y prendre garde en permanence sinon on loupe la rencontre avec l' autre et les chances de le convaincre s' amenuisent. Par exemple certaines chroniques françaises dans lesquels leurs auteurs rejettent d'un revers de la mains les piques de Williamson et de Saoudi en disent longs sur l' aveuglement, le manque de connaissance voir même sur un certain déficit d' empathie lié à des préjugés tenaces par les gens de classes moyennes à l' encontre de ceux d' en bas. Et au propos des réactions de certains critiques pro-Idles balayant sous le tapis l'aspect lutte des classes que porte en elle la polémique il y a quand même une sacrée ironie à les lire. Eux qui n' ont eut de cesse de parler et mettre en avant les parties pris de Talbot presque exclusivement sociétaux , sa dénonciation franchement caricaturale des élites, de la masculinité toxique et du racisme ne se limitent dorénavant qu' à citer vite fait les même sujets pour se concentrer sur de l' intérêt artistique (on verra plus tard franchement en berne) et divertissant du disque. Ils mettent en avant l' énergie dont les Idles font preuve et osent le folklorique second degré que nous sortent de la toute autant coutumière manière les classes moyennes quand on leur indique leurs erreurs, contradictions et parfois leur cynisme. Du fond dans ces chroniques? Plus grand chose ou si peu! Les qualités des Idles mises en avant : énergique, rigolo, spectaculaires et motivés, parfaits pour les festival, bref une définition adéquate du parfait entertainer. Euh... c' était pas censé être le populo qui se vautrait dans le divertissement abrutissant, toque et sans fond quand la classe moyenne se cultivait en écoutant des groupes intello ou engagé à la Radiohead? Quand Talbot dénonce dans ses chansons le racisme rural ou le vote Brexit un autre de nos chouchous le clash illico. Lias Saoudi des Fat WHite Family complète et précise la critique de Williamson: «La dernière chose dont notre culture de plus en plus puritaine a besoin en ce moment est un groupe issu de la classe moyenne auto-stérélisante nous disant d'être gentils avec les immigrants» Et d' en remettre une couche avec : "Vous pourriez appeler cela de l'art, je l'appelle un pédantisme sentencieux". Et oui je sais, il semblerait que l'on soit plus futé dans la working que la middle class et je vous épargne la réponse bas du front de Talbot tellement elle fut pathétique. En gros aucune remise en question et les faites pas chier pendant leur quart d' heure Warholien. On ne peut pas en appeler le peuple à l' unité et faire la leçon en même temps. Ça va très vite se révéler contre-productif. Cela rappelle beaucoup les critiques sur les gilets jaunes par la classe moyenne d'ici qui détournait la conversation sur l' homophobie et le racisme de certains et repoussait ainsi les justes et pertinentes revendications.

Et Saoudi de conclure sur un mode qu'on osera dire franchement DWTN anti-rétro: "Pour moi, le post-post-punk classe moyenne représente un effondrement dans la nostalgie, né d'un refus du présent, dans un monde où le futur a été pratiquement annulé."


Quand je l' avais abordé (ici) on pouvait déjà sentir mes doutes autour de la formation de Joe Talbot. Politique mais aussi musicale. J' écrivais à leurs propos de "gentillets soubresauts des guitares à l' agonie". Une manière de ne pas se faire aveugler par leur côté énergique et hardcore rafraîchissant un instant mais déjà mille fois entendu. L' énergie ne suffit pas toujours et on peut faire ou dire, d' énergiques conneries.

Autant le dire tout de suite leur troisième album a éclaircie les doutes et signe l' acte de décès de certaines prétentions post-punk que leurs illustres aînés avaient su maintenir. Les Idles s' y révèlent incapables de voir plus loin que leur bout du nez et offrent une redite ennuyeuse. Certains les imaginaient en Clash capable d'une certaine prise de risque stylistique avec une grande envie de découverte des autres courants musicaux extérieurs à leur scène, en réalité ils ne seront que des Buzzcocks de deuxième division. Incapables de la moindre prise de risque. Pire! Ils semblent régresser et perdent d' une manière prématurée leur tranchant. A part deux ou trois titres c' est roue libre et les chroniques dithyrambique semblent réellement exister que pour sauver le soldat Idles, tête de pont de l'industrie musicale en berne depuis le Covid. A moins que, ce ne soit que par simple réflexe d' auto-défense de classe? Le succés et l' usure des tournées n' y sont certainement pas étrangers. Mais il y a avait aussi peut être des capacités en deça de ce que certains ont cru ou voulu voir.

Leur penchant post-hardcore comme certains faux-semblants n' y peuvent plus rien pour faire passer la pilule. Le gentil et revigorant hédonisme engagé de leurs photos et prestations scéniques a fait place à une routine trop visible et devenant un brin agaçante. Ils sont même aller chercher le pote de Nick Cave, Warren Ellis, à la rescousse pour palier un manque évident d' imagination et d' originalité. Même Jenny Beth y va de son aide mais ne parvient à éviter le naufrage. Rien n'y fait. Et que dire d' une saugrenue tentative de lorgner les territoire plus dark d' Interpol sur le pathétique "A hymn" en guise de faux renouvellement mais vrai retour en arrière. Tentative qui a pour seul mérite de rappeler aux poissons rouges de la chronique qu' Idles s' est cherché longtemps, très longtemps, et qu' ils déboulèrent au début des 10's avec une espèce de redite d' Interpol/The Rakes chargée de relents ...U2 ! A ouais dit comme ça, on comprend mieux qu' il y avait un vers dans le fruit musicalement et politiquement. On a vraiment l' impression d' être face à un groupe un brin naïf qui après des années d' apprentissage avait trouvé une petite recette miracle mais se révèle pour l'instant incapable de voir plus loin et de se renouveler.


LES BONS. Voir même TRÈS BON.

Et le Post-Post Punk de Fontaines D.C. est-il comme celui de Idles un effondrements dans la nostalgie comme le dit Saoudi? Pas si sûr. Peut-être simplement parce qu'ils plus futés et courageux.

Fontaines D.C. était attendu. Inutile de présenter le plus grand groupe indie du monde (voir ici).Comment le groupe le plus prometteur de sa génération allait-il survivre à leur immédiat succès critique et publique. Allaient-ils se désagréger à la Stone Roses? Un premier album devenu illico un classique puis une triste agonie? Ils auraient pu faire comme Idles, se répéter inlassablement et devenir non pertinent. Mais non. Pas eux. Pas de trajectoire à la Interpol ou d' explosion dans la stratosphère à la Oasis. Ils avaient les cartouches pour ça afin que l'on y voit que du feu un temps mais ne l'ont pas fait.

Ce "A Hero's Death" est une prise de risque réelle et une réussite totale. La prise de risque de ceux qui ne cesseront pas de chercher, de se questionner et d' aller plus loin . Voilà la différence ultime avec Idles. Quand "Dogrel" offrait des hymnes poétiques euphorisants accessoirement calibrés pour les festivals " A Hero's Death" se révèle plus complexe à appréhender. L' euphorie fait place à une rigoureuse mélencolie. Quand "Dogrel" semblait cassant, flamboyant et carré le dernier offre des contours plus flous et présente des strates atmosphériques virevoltantes. Ainsi la voix de Chatten n' a jamais été plus hanté et déprimé. Bien moins gouailleuse. Ses textes sont plus introspectifs et délivrent une certaine angoisse absente aux débuts et réussit le miracle de perdre définitivement ses habitudes à la Ian Curtis. Mais il ne faut pas s' y tromper. Les Fontaines.D.C. ne se sont pas pour autant assagis. Toujours autant perturbateurs et anticonformistes. Toujours ces révolutionnaires insouciants développant une rage salvatrice alliée à une forte empathie. Les dignes héritiers de la tradition socialiste bohème de leur quartier ouvrier, The Liberties.

Si les paroles semblent plus personnels Chatem et ses sbires nous parlent bel et bien de notre monde contemporain à travers leurs expériences. Succés oblige Dublin et sa vie quotidienne est loin mais le Capitalisme et le consumérisme en prennent encore un sacré coup. Tiens! En voilà une autre différence et pas des moindres avec les Idles. Côté instrumentation ce groupe se révèle encore une fois l' un des plus talentueux et chercheurs. Plutot que des inventeurs révolutionnaires qui change la donne du jour au lendemain ils appartiennent à la caste des méticuleux qui par leur ingéniosité et sans crier gard assènent toujours la petite surprise qui additionnée aux autres fera toujours avancer le bidule. Les rythmiques sont tendues et musclées sans passer par la case dopage. L' influence de CAN est toujours persistante et agit discrètement pour singulariser l' ensemble. Les deux guitaristes diversifient davantage leur jeu et osent se faire télescoper des pans entiers de la culture indie d' une manière totalement nouvelle. La grande force de ce groupe est leur façon à la fois grossière et légère de citer le passé pour en un rien de temps offrir quelque chose de tout à fait personnel. Et que dire de l' étonnante capacité du groupe à passer d'une rive à l' autre de l' Atlantique sans que cela ne fasse artificiel et qu' ils perdent leurs identités irlandaises et européennes. Les guitares de Sonic Youth et de Television se retrouvent confrontées au savoir faire Britanique de toutes les époques. Un Morrissey jouvenceau embraye sur une intro Interpolienne ("You said") quand ce n' est pas l' hymne Glam "Ballroom Blitz"des Sweet qui se retrouve confronté au "Last Lite" des Strokes pour déboucher sur toute autre chose un rien Beach Boys en un seul titre" A hero's Deaf". "I Was not Born" déterre le Velvet en le déguisant en post-punk et "Living in America" rend hommage à Suicide. Fontaines joue des références pour mieux s' en éloigner et tracer son chemin. Au bréviaire post-punk les Fontaines D.C. ajoutent des pages de ballades Britpop que ne renieraient pas Blur et Oasis. Et quand retentit "No" en guise de conclusion je retrouve exactement la même émotion adolescente qu' il y a 30 ans avec le "Looking Glass" des La's. Fontaines D.C. avait offert un premier classique, ne vous posez plus de question. "A Hero's Death" est le deuxième.










PS Je n' avais pas envie de vous montrer les derniers clips des Idles mais finalement je pense que cela peut parfaitement illustrer les critiques et la réaction à ces dernières que j' aborde. Depuis les attaques ils ne cessent d' être filmés dans le quotidien du "peuple". Talbot qui prend sa voiture, les Idles font les courses et du covoiturage ou le "bon peuple" sait s' amuser façon clip caricaturaux à la con gnangnan du temps du confinement . Plus encore qu' auparavant. Quand ceux de Sleaford Mods faits avec trois bouts de ficelles transpirent le réel et la débrouille ceux des Idles, toujours bien foutu et plus léchés, semblent transpirer franchement un sale petit air de plan com.



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