ALE HOP & TITI BAKORTA , quand le renouveau des guitares ne passe pas par l' occident.
- Jojo Lafouine
- 8 févr.
- 4 min de lecture

Le Top 2024 de DWTN a confirmé que les guitares revenaient aux sommets si elles étaient placées entre de bonnes mains. Quand la nosltagie laissait enfin à la place à l' expérimentation. En ce début 2025 un album le prouve une nouvelle fois. Et comme il n' y a jamais de hasard la bonne nouvelle provient de l'un de mes labels préférés et entérine le fait qu' il faut cesser avec les sales vieilles habitudes égocentriques occidentales.
La péruvienne Alejandra Cárdenas aka Ale Hop est reconnue pour ses expérimentation électro-acoustiques en partant de la tradition musicale de son pays. Et en matière d' hybridation, de mélange des cultures et d' expérimentations réussies si il existe une très bonne adresse on ne la connait que trop depuis longtemps dans ce blog. Pour ça faut toujours surveiller de près le laboratoire Ougandais Nyege Nyege et son petit frère Hakuna Kulala. Par le biais d' une de ces résidences à Kampala dont Nyege Nyege a le secret, Ale Hop a travaillé avec le guitariste congolaise Titi Bakorta. Le fruit de cette collaboration est une merveille de remise à jour de la tradition musicale.
Quiconque s' intéresse à la musique africaine ou est amené à la croiser connait le Soukous. Et parfois sans même le savoir. Le bon vieux Soukous congolais qui a conquis l' Afrique depuis 40 ans est dès ses origines lui aussi le fruit d' un étrange croisement culturel. Les musiciens congolais s' étaient imprégnés dans les années 30 de la Rumba Cubaine diffusée par le colon d' alors sur les ondes de la radio Congo Belge. Plus tard dans les 60's les congolais ont rendu les rythmes de la Rumba Congolaise encore plus entraînants en accélérant le rythme et étendirent les structures des chansons par des improvisations virtuoses des guitaristes qui développaient des motifs très complexes.
Titi Barkota est l'un des héritiers de cette tradition. L' écouter jouer pourrait facilement vous amener à trouver le jeu de célèbres tricoteurs de cordes occidentaux tel un Johnny Marr des Smiths assez gauche si ce n' est infantile. Barkota et les siens sont de véritables virtuoses.
Fruit de leur collaboration "Mapambazuko" est donc une véritable remise à jour d'un vieux style. Pour faire court Titi Bakorta joue et Ale Hop propulse sa musique dans un univers paradoxale. Les rythmes anguleux et joyeux de l' un sont télescopés par le goût pour l' hallucination et l' expérimentation de l' autre. Le Soukous si euphorique et attendu dans un certain sens est d' un seul coup imprégné de chaos et d' impondérables. La joie rencontre l' étrange et le psychédélisme. Les samples aux origines multiples (synthés, enregistrements) d' Ale Hope et semblant discordants apporte ce surnaturel Sud Américains que l'on a déjà croisé autrefois chez Elysia Crampton (là) et plus récemment du côté du Baile Funk de Dj Anderson Do Paraiso (ici) et du Bruxeria Sound de Dj K. La production de Hope renforce la guitare de Bakorta à un tel degré que l' on peut évoquer le terme de Maximalism.
Aux six titres originaux présentés sont rajoutés trois remix assez inégaux. Si celui d' Ale Hope n' apporte pas grand chose ceux de la déjà vue ici Flora Yin-Wong et du très intriguant artiste Kényan KMRU rajoute à la proposition novatrice en passant par les cases Deconstructed Club et Ambient.
P.S. sous forme de petit coup de gueule.
Dans leur dernier numéro il est enfin fait mention de Nyege Nyege et de l' Ouganda chez les Inrocks (ici). Mieux vaut tard que jamais mais ma joie fut de courte durée. Si l' article est plus que pertinent et nécessaire en abordant ce que la communauté LGBTQueer et le Nyege Nyege Festival doivent affronter en terme de discriminations et d' homophobie il reste un âpre arrière goût après l' avoir lu. Les Inrocks, même si je sais qu' ils n'ont plus rien à voir avec ceux de ma jeunesse, se présentent toujours comme un magazine culturel très axé sur la musique. Mais seulement voilà. Pas une seule chronique portant sur des sorties Nyege Nyege ou Hakuna Kulala au cours de ces dernières années et les voilà qui aborde le sujet Nyege Nyege que sous le prisme sociétal de l' Homophobie sans qu' il soit une seule fois fait mention auparavant artistiquement des deux labels parmi les plus avant gardistes et passionnants musicalement (leur domaine pourtant).
Il me revient à l' esprit bien des extraits d' interviews ou des citations des artistes africains qui justement parlaient de cette approche typiquement occidentale. On va parler de l' Afrique que sous le prisme de ce qui ne va pas, abordant toujours les aspects les plus tristes et sombres en suggérant volontairement ou pas ce triste "retard" servant d' excuses aux visions colonialistes de toutes époques. Et ce sans jamais s' intéresser à ce que l' Afrique crée ou produit de passionnant. Ou alors avec toujours un certain retard si ce n' est indirectement quand par exemple une célébrité mondiale convoque un artiste de là-bas pour un de ses disque.
Je concède que peut être il s' agit d' une "maladresse" et que cette maladresse des Inrocks provient d'une certaine forme d' ignorance, et finalement d' un manque de curiosité ou de flaire journalistique (ce qui est déjà une sacrée faute pour eux dans un sens si on se réfère à ça ce qui prouve au moins que d' autres avaient fait le job) mais avouons qu' à l' heure du net de 2025 et de certains combats certaines lacunes et approches journalistiques occidentales sont toujours de mises et ce, partout, même dans la presse jugée progressiste.
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