Cela fait 5 ans que NON Worldwide existe. Et à peine un peu moins de temps que ce blog ne cesse de vous pousser vers ce collectif. Je vous invite donc à vite vous jetez sur les anciens articles le concernant. De près comme de loin. Commencer par là puis utilisez le moteur de recherche. Attention, votre journée risque être bien remplie mais ne craignez rien. Absolument pas perdue.
2019 sera-t-elle l' année qui verra NON Worldwide s' imposer définitivement comme boussole musicale mondiale? Une boussole musicale mais pas seulement. Politique et sociétale également. Une boussole permettant de retrouver le chemin de la résistance ou celui du futur musical. En tout cas ça commence très fort avec coup sur coup deux albums réussis qui finissent de dresser un tableau complet de la révolution NON Worldwide en cours.
Jusqu' à présent seul Chino Amobi parmi ses fondateurs nous avait offert une arme de destruction/révolution massive sous la forme d'un disque long format (voir ici). Disque susceptible de dresser un premier panorama objectif de l'univers sonore NON Worldwide mais un rien incomplet tant le collectif n' a pas d' œillères. De plus le reste du catalogue du label étant majoritairement et exclusivement constitué de ep ses productions étaient très peu cités dans les médias papier ou net tellement le format album est privilégié. Des Eps toutefois maintes fois célébrés par ici, Faka, Klein, Why Be, Dedekind Cut, Mhysa etc etc. Et ne parlons pas des compilations de la maison avec leur déstabilisante tendance à être d' une richesse extrême et ^à faire découvrir des artistes appelée sous peu à devenir majeurs. Bon nombre d' artistes découverts par le collectif signent ses albums et recueillent les lumières des projecteurs médiatiques qu' une fois partis vers d' autres labels et NON Worldwide et ses créateurs devenant un peu trop souvent les oubliés de l' histoire. Parfois c' est le contraire. Par exemple deux génies grandis ailleurs ont trouvé judicieux de fricoter avec la bande. Yves Tumor et Alex Zhang Hungtai aka Dirty Beaches. A noter concernant le dernier nommé que la cohorte de revivalistes et nostalgico-gaga qui l' aiment sans réellement comprendre tout à l' art impressionniste du bonhomme se sont abstenus de le suivre en ces terres franchement inhospitalière pour leurs esprits consommateurs et conformistes. Bref , même dans ce cas NON passait à la trappe. Il était donc temps que NON Worldwide prenne la place qui lui est due. Le trône! Les deux autres fondatrices du label ont enfin décidé d' apparaître au grand jour et c' est une délivrance et une confirmation pour tout ceux qui ont un jour tant espérer de ce collectif. NKISI et ANGEL-HO perpétuent chacune à sa manière le gros œuvres entrepris par Amobi. Une révolution. Tout simplement. Révolution musicale, politiques et sociétale. Il est juste dommage que les deux artistes NON Worldwide soient obligés d' en passer elles aussi par d' autres labels pour espérer toucher un peu plus les médias et bénéficier d' une distribution digne de leur talent.
ANGEL-HO "DEATH BECOMES HERE", BJORK DE PASSAGE DANS LES TOWNSHIP DE DURBAN.
Pour les retardataires NON Worldwide est un collectif d' artistes originaires d' Afrique. Y vivant ou issus de sa diaspora. Leur mot d' ordre est le suivant: utiliser le son pour dévoiler aux regards occidentaux de descendants des colonialistes les rapports de forces qui construisent notre monde. Ce qui se voit comme ce qui est invisible. Entre anticapitalisme, anti Colonialisme avec son dérivé moderne l' impérialisme et question de genre. ANGEL-HO (Angelo Antonio Valerio) sur sa musique et celle de NON Worldwide: "Un moyen d' exprimer la violence récurrentes sur les corps non blancs". Elle/il nous vient d' Afrique du Sud comme ses amis de Faka (Voir ici). A l' instar du duo la question de genre est centrale chez Angel-Ho.
Une nouvelle fois chez un artiste issu de NON Worldwide nous nous retrouvons confronté à un gigantesque travail de déconstruction suivi par une inévitable remise à neuf d' une multitude d' influences musicales. Un brassage précédant une relecture innovante. Des trois fondateurs de NON Angel-Ho est celle qui se rapproche le plus des territoires connus de la pop. On osera dire la plus accessible. Pour être plus précis vous trouverez dans son "Death becomes here" bien des choses s' apparentant à du R'n'b et le Rap. Mais vu, entendu et réapproprié d' Afrique et/ou au sein de sa diaspora. C' est donc d' abord un sentiment de déjà entendu et de confort qui agrippe l' auditeur. D' abord! Parce que très vite l' étrangeté, le goût du bruitisme, du sound collage cher à Amobi va s' incruster. Bousculer le tout venant pop et underground. Ce qui ressemble à l' autoroute mainstream pop va petit à petit dévoiler des trous, des chausse trappes et des virages imprévus. Agressions sonores maximalistes, industrielles ou digitales. Alternance dans le format d' instrumentaux et de chansons "pop". Question rythme le climat musicale de son pays marque tout le disque de son empreinte. Les boites à rythme semblent être faites du même matériau que celles ayant créer le Gqom de Durban après avoir servi le Kwaïto. C 'est peut être ici l' une des traces de nouveauté les plus flagrantes dans son R'n'b. Question paroles Angel-Ho peut parfois déstabiliser. Alternance de propos hyper consuméristes avec nom de marque cités et clin d' œil au monde la mode typiques du R'n'b vite éjectés par d' autres plus relatif à la question de genre à mille lieu de la mysoginie et du faux féminisme d' une Beyonce. Angel-Ho dit être fan de Missy Elliot et de Bjork. Elle ne triche pas en balançant des références abusives. Surtout concernant Bjork. Comme l' islandaise le personnage qu' elle s' est créé fait partie intégrante de la musique comme de l' aspect visuel. Le lien est d' autant confirmé que l' on peut aisément comparer sa "pop" à une sorte de croisement de deux collaborateurs de la reine Bjork, Rabit et Arca. Son premier album est peut-être celui qui pourra servir le plus aisément de porte pour les peureux et autres inhabitués à l' univers Deconstructed Dancefloor et Post-Club qu' elle- seule conjugue le plus éhontément sur le mode pop . Son R'N'B mutant dans le rôle de la clé idéale.
NKISI "7 DIRECTIONS", REVOLUTION TECHNO OU AMBIENT? DECONSTRUCTED CLUB ASSUREMENT;
Si on peut titiller sur le disque d' ANGEL-ho en argumentant qu' il ne brille pas vraiment par son originalité à tout instant de par ses aspirations pop mainstream, comme on pouvait passer à côté de celle d'un Yves Tumor en 2018, il en sera plus difficile concernant le "7 Directions" de Melinka Ngombe Kolongo aka NKISI. Ce disque est une franche et magnifique réussite moderniste. Comme chez sa collègue le terme déconstruction est central et en la matière sa signature sur le label d'un des maîtres du genre est un gage sûr. Que Lee Gamble craque sur sa musique après celle de l' une des révélation 2018 ZULI et vous n' avez qu' à suivre aveuglément comme avec l' égyptien. Ce disque offre l' alliance parfaite de l' Ambiant et de la culture du Beat. Option polytrythmie cochée au gros marqueur pour la dernière qui fait de ses aspirations Techno un changement conséquent dans le domaine plutot qu' une simple relecture trop sage. Une autre influence pas toujours bien vue mais déjà copieusement citées par ici (Lorenzo Senni, Gabber Eleganza ou au sujet du Singeli de Bamba Pana (ici) ) pointe clairement son bout du nez. Le Gabber. Rien d' étonnant puisque cette originaire du Congo a passé sa jeunesse au sein de sa diaspora en Belgique. Plat pays ex colonisateur mais aussi Terre de Gabber par excellence. Pourvu d' un gros bagage en Psycho acoustique acquis entre Bruxelle et Londres NKISI n' en a pas pour autant oublié ses traditions musicales et spirituelles puisqu' elle fait appel amplement à la cosmologie Bantoue pour construire sa musique. Je devrai dire par sculpter son œuvre sonore tant elle se plait à tirer des passerelles entre les deux arts. Encore un point commun avec Gamble. Chez Nkisi l' aspect coutumier soulageant de ses nappes synthétiques ambiant est contrebalancée systématiquement par sa maîtrise polyrythmique faite de boucle s' approchant parfois d' une singulière martialité apportant étrangement une ambiance angoissante . La rythmique prouve une nouvelle fois sa capacité à changer la perception de l' auditeur. S' en dégage ainsi une finition aboutie franchement hypnotisante et prenante pas si évidente au premier abord si il n' en subsistait que le squelette rythmique. Nkisi nous offre ainsi probablement le meilleur album de cette année commencée pas franchement sur les chapeaux de roue. Tout style confondu Il apparaît très clair qu' il va de plus en plus être difficile d' éviter la sphère NON Worldwide en cette année 2019 quelque soit les chapelles. Amobi s' occupant de l' expérimentation la plus obtuse, Nkisi redéfinissant le dancefloor en le rapprochant de l' ambiant quand Angel-ho pervertit le R'n'b let le rap les plus mielleux ou caricaturaux.