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JOHN MAUS: Fin du quiproquo? Notre héroïque pourfendeur de l' abus d' ironie et de cynisme


Après son pote Ariel Pink cet été (voir ici) le génial cinglé John Maus revient 6 ans après son dernier album. L' attente fut longue. Trop longue? Découvrir ce quatrième album amène à des interrogations. Elles étaient déjà présentes dans mon esprit au sujet des deux derniers Pink et il devient vital de les affronter quand il est question de nos deux héros musicaux. Héros pas seulement pour des raisons purement de ... "goûts musicaux" consuméristes ou de maquillage sociales et culturelles". Le machin baptisé Hypnagogic pop apparu fin 00's et peu abordé en France, si ce n'est avec des pincettes par les hallergiques à toute forme de réflexion poussée sur la musique, c 'était d' abord et avant tout, lui et ses deux potes! JOHN MAUS, ARIEL PINK et Gary War. Daniel Lopatin et James Ferraro suivirent de près. L' hypnagogic pop avec son interrogation sur notre rapport au passé musical, à nos souvenirs, et tout ce qu'elle entraîna comme réflexion (la nostalgie, le vintage, la révolution numérique et le flux d' info, l' état du monde etc etc) et nouvelles formes musicale. Les intentions et le gigantesque attirail de concept que Maus et ses deux compères voulaient transmettre par leur musique, tout ce bordel essentiel pour comprendre l' enjeu de ces artistes et de l'hypnagogique pop, et bien ce bordel est tout bonnement passé à la trappe chez bon nombre de fan en pleine confusion rétrogagaïste et hipstériennes. L' aspect dystopique porté par leur rétro futurisme? Emporté par la pose des uns et la toxicomanie à l' unique rétromanie des autres. A moins que la dystopie ne soit devenue l' argument malhonnête d' individualistes forcénés et suicidaires.

Je n'aborde pas ma musique en termes de nostalgie ou de rétromanie" John Maus Novembre 2011

Au moment de se retirer le bon John nous avait assuré vouloir se relancer dans l' expérimentation et tenter de nouvelles approches. Trop lucide qu'il était pour ne pas voir l'impasse lui arriver dessus et surtout les quiproquos qui commençaient à s' additionner à son sujet. Le quiproquo en pop n'est pas une nouveauté. Voir des gens aimer une musique qui dénonce leur comportement, leurs valeurs ou ce qu'ils sont, on l' a déjà vu. Mais celui dont sont sujets Maus et Pink est peut-être l' un des plus frustrant et énorme. Depuis 2011 Maus et Pink ignorés pendant les 00's alors qu'ils étaient bel et bien actifs (et déjà géniaux) ont vu un statut culte et un éclairage médiatique assez surprenant leur tomber dessus. Surprenant par l' origine de l' intérêt porté et sa nature. Parce que derrière une côte d' amour en hausse permanente il y aurai comme qui dirait une grosse méprise. John Maus est un anti-ironie et cynique à l' instar de ses prestations scéniques héroïques et brut de décoffrage. Pas de chichi et de folklore rock'n'roll/pop/"spectaculaire" (dans son sens situationniste). Une bande magnétique pour le refus d'une certaine authenticité désirée par certains et un type qui tel un soldat en combat donne tout ce qu'il peut. Une autre forme d' authenticité contre la pose et la routine. John Maus entendait lutter justement contre ce que le comportement dont ses fans en pleine méprise sont symptomatique par leur façon d' aborder la musique. "Screen Memories" jette un petit voile sur les belles promesses et les espoirs placés en lui pour briser la méprises de certains au cours de son absence tant on a le sentiment de se retrouver en territoire connu aux premières écoutes. Je reconnais que je suis un peu dur parce qu'à y regarder de près ce prochain album n' a pas à rougir face aux trois premiers et à la compile d' inédits sortie entre-temps. Mais dans ce blog on préfère aller plus loin que le simple "c' est bien foutu" et la simple question de "goût". Outre le sentiment d' accalmie en comparaison aux précédents il y a dans les paroles une petites évolution. Quelques petits indices qui montre que Maus est loin d' être naïf et dupe face à l' amour porté par une partie de ses fans et l' accueil des médias. Certaines de ses paroles maintes fois répétées tel des slogans politiques comme toujours chez lui devraient faire tiquer les oreilles de certains. Mais je crains que ce ne soit toujours pas le cas faute d'une forme musicale devenue trop facilement récupérable car déjà assimilée, et donc lue sur plusieurs degré et surtout ceux qui ne poussent pas à la remise en question. Musicalement on se retrouve malgré une plus grande maîtrise et un soin plus important à sa production toujours devant la même recette que celle de "We Must Become the Pitiless Censors of Ourselves". Ce détournement d' éléments synthpop 80's (les année de la poussée Néo-libérale et du capitalisme triomphant sur toutes autres idéologies) , ses influences classiques et baroques, cette posture post punk évoquant le mariage entre la proto électro de Cabaret Voltaire et Current 93 pour l' imaginaire et les craintes de fin du monde moyen-âgeuses omniprésentes. Maus explique avoir passé le laps de temps qui sépare ses deux albums à s' amuser avec les puces électroniques afin de construire ses propres synthés et ça se sent. Il est probable qu' à l'instar de Pink lui aussi a donc cherché à nettoyer le son hypna au moment où bien des suiveurs s' en sont emparés (la chillwave). Ce son qui rebutait au tout début tant de gens devenu depuis des fans (croyez mes expériences perso de tentative de partage). Ce qu'il faut bien comprendre avec "Screen Memories" c' est que l' on est une nouvelle fois devant une relecture du passé qui se veut plus une perversion, une manipulation qu'un simple copiage dénué de réflexion qui satisfait la partie de ses adorateurs en pleine méprise. Malheureusement à l' image de "Teenage Witch" il semble que Maus en nettoyant sa production lo-fi plus difficile d' accès affiche moins clairement le détachement et l' analyse d' autrefois face la nostalgie. Cette chanson évoque par sa musique une nostalgie léchée de l' adolescence, un "c' était mieux avant" cher à tous les fans de vintage. Oui mais les paroles ne décrivent pas des souvenirs tranquilles, un instant de vie purement agréable. Il y a quelques petites surprises dévoilant un développement comme ce titre tellement Pinkien avec sa grosse guitare FM mais beaucoup moins charmante que ses éternels synthés néo-baroque("Find Out"). La surexcitation semble faire place à certains moment à des instants méditatifs surprenant de la part de cet hyperactif . Pour conclure sur la simple appréciation musicale ce "Screen Memories" est aussi intéressant que les trois précédents mais seulement voilà, on en est au 4ème après 6 ans d' attente et...: "Si le statu quo est un état politique ou un langage musical, l'idée devrait être de tuer ou renverser cela." John Maus Novembre 2011

Au début des 10's Maus et Pink cernaient parfaitement certaines petites choses comme par exemple l' overdose d' ironie, de cynisme, de consumérisme et de superficialité recouverte de fringue vintage et de rétromanie qui guettait et étouffait la musique et la société. Exactement ce qui peut décrire le comportement de la partie de ses fans en plein malentendu. Ironie et superficialité surtout pratiquées dans la classe moyenne blanche occidentale, celle étant censé être culturellement "plus ouverte", "plus progressiste", "plus curieuse" et "plus armées en outil critique". Et c' était plus particulièrement le cas dans l'indie music (LA musique de ces classes sociales) qu'ils secouèrent. Un autre n'a t-il pas dit récemment : "On s’est trop habitués à l’indie rock, qui est une appropriation bourgeoise du rock, sans fond, sans danger ni excitation." Ian Svenonius (The Make Up)

Face à ça ,toujours selon Maus en interview, le chanteur pop était censé être le courageux et vaillant chevalier des temps anciens qui remet le monde dans le bon sens. Qui use de la meilleur arme et pour lui ça signifiait que le musicien se devait de trouver un nouveau langage pour parler de la façon dont les gens se rapportent les uns aux autres. Dans un sens Maus bien avant les politologues et les politiques en appelait déjà à une certaine forme de populisme en musique. Attention, le populisme n' est pas le clientélisme démago surfant sur la nostalgie et les niches stylistiques pseudo contestataire qu'il dénonçait justement. Lui c' était le bon côté de la médaille. LCD SOundsystem ou le rock garage l' autre face malgré eux. Il est loin le temps où Maus passait pour un naïf utopiste et déclenchait les sarcasmes ou l'incompréhension des cyniques en beuglant "right for the gays" ou "Cop Killers". Faire des chansons engagées, réellement, certains de ses fans actuels trouvaient ça trop facile et sans intérêts. Le fameux retour du populisme que j' écrivais plus haut. Un appel à l' engagement et un rappel du rôle artistique de la pop alors que tout amenait à l' asservissement consumériste et au conformisme. Et notre bonhomme d' "accabler" les neuneus journalistes pas venus pour ça de concepts et de citations provenant d'un Deleuze ou de Badiou. "Cop Killer est le moyen idéal de mettre en avant l'idée que tout programme politique ou artistique valable devrait chercher à renverser la situation telle quelle. Que le statu quo soit un état politique ou un langage musical, l'idée devrait être de le tuer ou renverser cela. La chanson ne consiste pas à tuer un être humain, mais à surmonter l'inhumanité, à détruire la machinerie qui nous tourne vers une fin autre que nous-mêmes".

John Maus 2010 Maus disait et, c' est ça mon gros problème avec ce disque, semble encore nous dire en 2017 : "attention un jour on va avoir un président dangereux" à force de ne pas parler simplement de l'essentiel alors qu'il faut dorénavant écouter et s' adresser au peuple et non à un coeur de cible commercial et culturel dans nos chansons. Tout ce qu'il avait prévu, ce gouffre s' apparentant à la fin du monde, est devenu palpable pour un plus grand nombre. Trump, Brexit, Macron et réchauffement climatique... c' est arrivé, c' est sous nos yeux, et Maus est encore dans le signal d' alerte. C 'est ça qui gène un peu dans le dernier disque avec son manque de changement radicale dans la forme par exemple qui aurait permi une adaptation à la situation qui a changée et bien sûr au quiproquo lié sur la rétromanie.

Entre 2011 et 2017 lui et ses compères de l' hypnagogic pop ont participé activement à changer la donne en enfantant bien des artistes et des mutations en musique. Mutations certes encore très peu répandues dans les gros médias "indie" mais on les perçoit de plus en plus tel la gène occasionné par la redite rétrogaga qu' ils dénonçaient et détournaient s'une certaine manière. Le maître en passe d' être dépassé par les élèves et les changements qu'il avait pourtant appelé de ses voeux, anticipé jusqu' à les provoquer? Et en plus, bien évidemment, ce qui devait arriver arriva, les cyniques de tout poil maître absolu de l'ironie et autres hipsters stigmatisés par les deux gars se sont donc mis à adorer Maus et Pink avec leurs aspects vintages et rigolos. Sans parler de la pléthore de musiciens so 80's comme Maus mais totalement à mille lieu dans les intentions et le degré de réflexion (Alex Cameron). Les conceptes d' Hypnagogic pop ou d' Hauntologie et tout ceux spécifique à Maus leur sont bel et bien passé par dessus la tête et ça, dès 2011;l' américain regrettait en interview via un jugement sur les guitares qui doit franchement géner ses fans de garage soit disant aventureux par exemple.

"Je pense que les synthétiseurs et les formes d'onde permettent une complexité sonore qui dépasse la palette des guitares traditionnelles ... La palette était là dans les années 80 alors pourquoi a-t-elle été mise de côté et oubliée? les timbres et les sons offrent tellement de couleurs et de possibilités, me semble-t-il, que les possibilités de la guitare ont été épuisées."

Le pari de piocher dans le passé pour justement critiquer son utilisation ad nauseam sur le seul prisme de la nostalgie et de se trouver un coeur de cible était risqué en terme de quiproquos et de confusions avec les clientélistes. Qui plus est en privilégiant le format pop là où d' autres faisaient fuir les tricheurs en réussissant à éviter les amalgames par une expérimentation moins commerciale. Demdike Stare et Lee Gamble pour le dancefloor et Leyland Kirbye pour la musique ambient. Maus et Pink font dans la Hauntologie comme tous les nom cités. La Vaporwave (les vrais punks des 10's), ce qui la suivi tel les artistes d' Orange Milk Records, James Ferraro ou Oneohtrix Point Never ont développé de nouvelles formes en matière d' emprunt et de détournement du passé. Ils ont affiné les critiques et multiplié les points de vue éclairant comme par exemple sur le rôle en matière de communication de la culture pop. Des gens comme Arca ou Holly Herndon ont dépassé le stade du post-modernisme pour ré-ouvrir via la technologie la boite de pandore (aux yeux de certains) du modernisme. NON Worldwide ou certains artistes post-punk (Protomartyr, Sleaford Mods) ont remis au goût du jour et élargie la critique sociale et politique après que Maus les ait juste ébauché, regretté et espéré. Là où Protomartyr par exemple pallie le manque de renouveau musicale par la grande forme de son chanteur/parolier Maus apparaît beaucoup plus timide. Timoré face à NON Worlwide pour être plus exact. Là ou Daniel Lopatin excelle et se renouvelle dans les trouvailles d' artefact pop à détourner notre Saint John semble être devenu justement un artefact du début des 10's et de l' apparition du courant hypnagogic pop. Epoque pourtant pas si lointaine.

Finalement à la question de savoir si je conseille ce disque j' ai envie de vous dire de juste s'y arrêter et ensuite d' aller voir ailleurs en passant juste avant par ses 3 premiers albums qui, malgré le temps écoulé, semblent encore bien plus pertinent et possède toujours la vitalité dont ce tardif "Screen Memories" semble manquer. Histoire de se rappeler que ce type est un héros, certes fatigué (définitivement? pas sûr!). Un des rares qui ont réenclenché la marche avant musicale et critique quand tous les autres utilisaient le passé à des fins cyniques, nostalgiques et idiotes en nous suggérant que l' histoire était fini. "Screan Memories" sera bientôt dans tous les bons apéritifs dînatoires pour cyniques arrivistes, bobos, réac faussaires, poseurs, dragueurs vicieux et hipsters. Afin d' éviter tout quiproquo et confusion faites leur écouter ceci, ils ne connaîtrons pas, n' aimeront pas et disparaîtront parce qu'il y a des merdes bien plus aptes à satisfaire leur triste désir de posture facile et de consumérisme béat. Et pourtant. Avec leurs sales manières de décrire le vrai monde du présent en piochant dans les poubelles et tous les genres... Ce sont LES "We Must Become the Pitiless Censors of Ourselves" de 2017 ou du moins, ses enfants légitimes!


Pas le temps de chronique Le Nmesh et l' année hallucinante de son label Orange Milk Records mais allez sur le site du label. Nmesh? "C' est comme comme des Avalanches avec un cerveau"


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