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DANCING
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THE
NOISE

Haley Fohr aka Circuit Des Yeux

ETHEL CAIN, de la Pop Indie aux tréfonds des States. Pays malade depuis ses origines.

Dernière mise à jour : 26 janv.





Jeudi 16 Janvier dans la soirée.


Un bruit sourd à l'origine inconnu associé à d' autres sons évoquant l' électricité perturbent mes sens. L' ambiance est lourde. Pesante. Des voix étouffées laissent parfois la place à une autre voix. Une voix spectrale qui me berce pour mieux m' entraîne vers les tréfonds de l' âme humaine. Quelque chose ne tourne pas rond et un drame est à redouter.

La sensation est très forte d' autant que certains sons exhument en moi d' autres très similaires sans que mon vieux cerveau ne trouve ni l' origine ni la nature de ces derniers.

Par réflexe inepte je regarde mon fil twitter. Tout y est pitoyable. Flippant. Grotesque. Pathétique et dramatique. Puis de nouvelles notifications apparaissent. Toutes proviennent de sites américains et traitent du même sujet.

David Lynch est mort. Parfois le hasard réserve bien des surprises auxquelles on ne peut s' empêcher de répondre par des interprétations aventureuses. Le lien que ma mémoire défaillante s' obstinait à contourner venait de gicler enfin grâce à une bien triste nouvelle.

L' un des artistes les plus passionnants de ces quarante dernières années venait de casser sa pipe et le choc personnel comme celui provenant des réseaux sociaux fut l' un des plus puissants depuis la mort de Bowie. Fatalement dans ces moments rares et intenses on ressort la phrase : "Je me rappellerai toujours ce que je faisais à ce moment-là". Pour Lynch ce sera "J' écoutais Ethel Cain". Et rarement dans pareille occasion les choses ne pouvaient pas tomber... mieux! Les sons entendus sur l' album de Cain. Cette ambiance sombre et pesante... Eraserhead.




Hayden Silas Anhedönica aka Ethel Cain avait fait surface dans mon univers personnel fin 2022 à l' un des pires moments de mon existence. Un certain sens du timing la Ethel. Il fallait bien continuer à vivre donc... Continuer à écouter. Dans ce but je m' étais contenté exceptionnellement au vue de mon contexte à aller voir les top annuels des sites musicaux. Comme d' autres s' accroche à la première bouée venue. Le nom alors inconnu d' Ethel Cain trustait les premières places. Ma découverte de son single "American Teenager" me laissa sur ma faim même si j' avouais en moi même qu'il s' agissait d'une classique Pop Song Indie assez parfaite. Le clip l' accompagnant possédait lui aussi son petit intérêt en comportant une certaine dose d' ironie derrière son optimiste caricature d' American way of Life. La découverte de l' album s' imposait afin d' éviter de rapidement penser qu' il ne s' agissait que d' un emballement critique sur un album pas vraiment nullissime mais certainement poussé par la quête d'une tête de gondole facile pour une scène Indie et ses médias en désespérance .


"Preacher's Daughter" se révélait être bien plus complexe qu' une simple succession de "tube" indie Dream Pop. Les titres s' avéraient être longs et l' ambiance pas franchement à la joie. On était bel et bien passé derrière le clinquant optimiste de l' american way of Life auquel plus personne ne croit vraiment depuis trop longtemps. Très Americana et à la fois très éthérée et gothique. Si parfois sa voix pouvait par certains tics très ricains et mainstream agacer j' ai du m' avouer qu' elle avait le don de soigner mes plaies du moment. Plus je m' enfonçais dans le disque et plus l' aspect malade et étrange de l' univers de Cain prenait le dessus. Les paroles me racontaient une sordide histoire de Serial Killer dans un bien triste pays et je ne vous parle même pas des sombres et sordides histoires de congélateur à la fin du disque. Musicalement c' était bien foutu mais pas vraiment susceptible de bouleverser un vieux de la vieille comme moi alors qu' à contrario les paroles étaient de plus en plus glauques et glaçantes. Finalement Ethel Cain n' osait pas assez l' étrangeté avec sa musique. Mais ça, , c' était juste avant le stupéfiant triptyque composé de "Ptolemaea", "August Underground" et "Televangelism".

Avec ces trois titres ce que j' avais pris pour une sympathique mais gentillette futur star de l' Indie Pitchforkienne à la Lana Del Rey changea radicalement de catégorie et de division dans mon esprit. Elle osait.

Son dernier disque s' appelle "Perverts" et vient tout juste de sortir. Rien que le titre de l' album suffit à prévenir. Âme sensible s' abstenir. Il va être question de la perversion et ce sous toutes ses formes. La belle Ethel grandie sous les lois rigoureuses Baptiste de son environnement du Sud des Etats Unis nous parle d' onanisme, de pédophilie, de transgression et de damnation éternel.

Dès le premier morceau du disque donnant son titre à l' album c' est un cantique venu des abîmes qui vous cueille pour très vite faire place à un bruit sourd et des voix étouffées inintelligibles. Les titres y sont encore plus longs que sur le précédent. Par la suite des bruits statiques d' électricité, des pas inquiétant et des drones meubleront et perturberont vos sens. Le silence? Jamais. La sérénité? Jamais.

Parfois quelque chose qui ressemble à une pop song classique surgit servant de respiration dans cette ambiance Dark mais faut-il encore ne pas trop prêter attention aux sujets abordés. L' instrumentale domine et le chant n' a droit qu' à une portion congrue. Le reste du temps on navigue entre le Slowcore, la Dark Ambient et le Spoken Word. C' est le genre de disque avec lequel l' entre deux n' existe pas. Certains vont le vénérer et s' y replonger à corps perdu quand chez d' autres l' incompréhension se mariera à l' ennui ou à la sidération négative.


Ce qui semblait être encore une hypothèse sur "Preacher's Daughter se confirme. Ethel Cain se voit comme musicienne et cinéaste. Encore un point commun avec Lynch qui aura lu aussi touché à tout. Ethel Cain marque par sa capacité à maîtriser son art très casse gueule par sa nature. Elle possède ainsi un ton toujours juste, un sens aigu du rythme et sa production se révèle être très inventive et parfaite. La charge émotionnelle est gigantesque et ce disque peut jusqu' à détruire certaines de vos certitudes sur l' humain et vous même. Les paroles sont toujours flippante si ce n' est encore plus sombres et tordues sans que l' on tombe dans un délire caricatural qui en ferait trop. Les synthés bourdonnants, les bruits Industriels et les drones de guitares entra perçues sur le premier albums sont ici mis en pleine lumière. La voix de Cain prend un ton encore plus envoûtant.

Ce disque nous est présenté comme un ep et non un album selon son auteur qui rajoute qu' il s' agit d' une oeuvre à part dans l' univers de son pseudo Ethel Cain et que "Preacher's Daughter" aura une suite.

Peu importe ce que l' avenir nous réservera de sa part mais ce virage poursuivi vers une musique expérimentale et dans un certain sens ce refus de jouer le jeu du star system Indie musicale Pitchforkien, que tant de ses tristes congénères adoptent sans aucunes remises en question, place immédiatement Ethel Cain dans un univers bien plus haut. Entre une Grouper, un Nick Cave pour l' amour des références et biblique et une Nico pour le goût du risque expérimental.





Post-Scriptum.


Mardi 20 Janvier au soir. Toujours Ethel Cain dans le casque et des sensations Lynchiennes. Je pense à la chronique que je vais écrire sur "Perverts" en regardant l' investiture de Donald Trump. Je baisse le casque pour écouter son discours. Il est question d' un mur, de digressions plus stupides et hors sujet les une que les autres. Et ce devant un parterre de milliardaire (Bezos, Zuckergerg et notre Bernard Arnaud national se prenant en selfie tel un touriste ébahi devant un spectacle du Puy du Fou).

Trump s' adressait non pas à des demeurés mais aux habitants malades d' un pays lui-même malade depuis toujours. Un pays qui domine encore pour un temps notre monde au nom du dieu Capitalisme. Les milliardaires en sont les idoles et Trump la triste et inévitable conséquence.  Plus tard au cours de la soirée je verrais même un type faire un salut Nazi. Et encore une fois le monde médiatique et leurs moutons de s' offusquaient et de feindre la surprise devant ce qui n' est n' est qu'un pathétique et glaçant spectacle issu d'une logique qui ne cesse de se répéter depuis des lustres. Elon Musk, juste un héritier mégalo suprémaciste blanc qui ... quelle surprise... est né et grandi sous l' apartheid avec un père gérant de mines de diamants. Et ça aussi on le sait depuis des années.

Mais quoi de plus normal. Cette nation qui, comme le rappelait Lynch grand pourfendeur de d' Hollywood et de son culte de la célébrités et du succès, est celle qui est née d' un génocide et la seule a avoir osé provoquer Hiroshima .

La musique et les paroles d' Ethel Cain nous parle très bien de cette nation et des traumas si prévisibles qu' elle engendre sur sa population.



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